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2017-11-08T16:05:49+01:00

Ta mort imminente m'as appris la vie...

Publié par Moi et mon "joli chapeau"

Crois moi, il fait bon d'être soignant auprès de patients comme toi. En deux jours, tu as voulu te plaindre à mon supérieur de ce pansement qui s'est mis à couler.  De cette tablette où quelques miettes subsistaient. De tout et n'importe quoi.  La demie journée après l'annonce de ton cancer métastasé à ton entourage, tout était de ma faute. De la lumière qui fonctionnait mal à l'isolation mal faite de ta chambre.  J'ai refais tes pansement plusieurs fois dans la matinée, autant que ce que tu me l'as demandé.  Ils étaient propres, hermétiques, mais tu avais besoin que je m'occupe de toi et de ta famille. Alors malgré mon immense charge de travail et mon service qui s alourdissait de minutes en minutes, je t'ai donné cette attention dont tu avais besoin.  T'écoutant déverser ta colère sur chaque individu qui passait, c'était souvent moi. Les premières minutes ont été difficiles, t'entendre dire que je faisais mal mon travail, t'entendre critiquer mes collègues pour des choses qui me paraissaient des futilités et pourtant la journée à du continuer. Et voyant l'équipe qui s'éloignait petit à petit de ta chambre, ne supportant plus entendre tes reproches et tes remontrances infondés, j'ai du me rendre dans ta chambre encore un peu plus souvent.  Vous voyant évoluer avec cette nouvelle qui venait de t'être annoncé. Les premiers temps j'ai du prendre sur moi, et pourtant ma journée à été rythmé par les visites dans ta chambre.  Au risque des reproches incessant et de votre colère débordante, j'ai eu besoin de venir voir comment vous alliez. J'ai compris que vous ne maîtrisez plus rien, que la gestion des soins et de l'environnement était votre moyen de maîtriser encore quelque-chose faute de n'avoir d'emprise sur la maladie, sur la vie et sur la mort qui approche à grands pas et qui fait très peur ..

Le lendemain la journée s'est déroulée au regard de la veille et pourtant à dix huit heures, juste avant de partir, ta femme a pleurer dans mes bras, comme ça, sans que je ne voye rien  arriver. Elle s'est effondrée dans mes bras, moi qui était la fautive depuis deux jours. Fautive de n'avoir rien pu faire de plus pour ton mari, moi contre qui tu as été en colère, à qui tu en as voulu.  C'est aussi dans mes bras que tu es venu chercher du réconfort, tescusant de ce comportement, m'expliquant parallèlement que tu faisais comme tu pouvais. Que c'était crier ta colère et ton désarroi contre ce système de soin, contre la vie, ou t'en allait en courant aux vues du quotidien qui t'attend ces prochains mois. Il était dix huit heures et tu pleurais dans mes bras car moi, cette infirmière "tellement pas à la hauteur" et pourtant qui ne répondait pas et qui gardait le sourire de rigueur, je ne serai pas là demain. 

Et aujourd'hui, tu vois, devant mon assiette de dessert au restaurant je pense à toi et à cette mandarine que je t'ai épluché hier à midi. Moi, cette soignante si imparfaite à tes yeux et que tu as pourtant réclamé si souvent au cours de ces derniers jours, je m'aperçois qu'il fait bon d'être soignant aux côtés de patients comme toi. Sans filtres et sans manières, tu m'as mis face à la réalité de la vie, et de la mort aussi, et c'est finalement bien pour ça, que j'ai choisie d'être infirmière.  

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